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21/03/2013

Autodafé numérique

 Parfois la lassitude permet une certaine lucidité. A envoyer des manuscrits à droite, à gauche, depuis des années, à considérer l’écriture aussi nécessaire que la respiration (quoique je respire plus mal que je n’écris parait-il) ; à force de tentatives infructueuses pour intéresser qui que ce soit à ce que je peux écrire ; à force de regarder ce qui est « bankable » en édition comme bien loin de mon univers, à force, j’ai tout brulé.

Non pas d’un feu réel, qui au moins m’aurait apporté la chaleur et la joie que procure tout feu, finalement. Non. Juste le froid cliquetis de la souris, qui s’arrête un instant sur un document, clic droit et puis supprimer. Simple et rapide. Aussi simple et rapide, vider la corbeille, et ainsi effacer de deux petits gestes quelques sept ans d’écritures. Sept ans, l’âge de raison, sept ans peut-être pour me rendre compte enfin que je ne produis que de la merde, qui ne vaut que courrier peiné :  « nous somme au regret de… »

J’étais au regret, moi aussi. Au regret de me demander pourquoi tant d’obstination ? Au regret d’affronter la réalité froide et triste : je n’y arrive pas.

Pourquoi ? Pourquoi lui, et pas moi ? Pourquoi elle et pas moi ?

Je suis au regret d’avoir eu l’arrogance de penser que j’écrivais au moins aussi bien qu’elle ou lui, que mes histoires valaient bien la peine aussi d’être partagées.

Je suis au regret d’avoir eu ces horribles sentiments de jalousie, d’envie, de ceux qui tordent l’estomac, sans oser les exprimer car cela ne se fait pas. Pourtant….

Mais pire que tout, je suis au regret d’avoir oublié pourquoi j’écris. Non pas pour être publiée, non. J’écris parce que si je n’écris pas, je meurs. Ma respiration chaotique d’asthmatique qui se soigne quand elle y pense (rarement…)  ne suffirait pas à me maintenir en vie, si je cesse d’écrire. Voilà ce qui me tient, me garde en vie, m’est indispensable comme un second souffre : écrire.

Alors je puis bien supprimer tout les fichiers du monde, ce que j’ai déjà écris, qu’importe, je continuerais d’écrire.

Ces lignes me manquent déjà, je m’en veux d’avoir procédé à cet autodafé numérique. J’ai été orgueilleuse, et cet orgueil m’a couté sept ans de ma vie, effacés d’un clic.

Ne me reste plus qu’à faire mienne cette citation de Kipling :

« Si tu peux voir détruire l'ouvrage de ta vie et, sans dire un seul mot, te remettre à le rebâtir, tu seras un homme, mon fils. »

Il va donc être temps de devenir un homme, en plus du reste.

22:22 Écrit par Océane | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | | | | Pin it!

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